Le vol thermique représente sans doute le plus fascinant des moyens de déplacement. La possibilité de s’élever dans les airs, sans le moindre effort de notre part, est très attirante; cependant, nombreux sont ceux qui ne parviennent pas à comprendre les lois de la physique en vertu desquelles un objet de dimensions et de poids considérables peut s’élever dans les airs comme le font les planeurs.
Un peu de physique.
Les thermiques” sont des masses d’air plus chaudes que l’atmosphère environnant. Grâce aux règles de la physique que nous avons brillamment assimilées durant nos années de lycée, nous savons (je l’espère) que lorsqu’on chauffe un gaz, comme l’air qui nous entoure, il se dilate et sa densité diminue. En appliquant le vieux principe d’Archimède selon lequel “tout corps (même une bulle de gaz) plongé dans un fluide subit une poussée verticale, dirigée de bas en haut, égale au poids du fluide déplacé et appliquée au centre de gravité de ce corps”, l’air chaud, moins dense, est poussé vers les couches les plus hautes de l’atmosphère.
Le vol thermique se fonde sur l’idée que si nous parvenons à fabriquer un aéroplane capable de se déplacer dans l’atmosphère à une vitesse de descente, disons, d’un mètre par seconde, et que nous le faisons évoluer dans une masse d’air qui s’élève à une vitesse de (par exemple) quatre mètres par seconde, le résultat final sera le suivant, l’avion se déplacera à une vitesse de montée de trois mètres par seconde. Les chiffres que nous mentionnons ne sont pas du tout exagérés, les planeurs modernes sont capables de voler à une vitesse de descente de moins d’un mètre/seconde et il n’est pas rare que les ascendances thermiques soient animées de vitesses supérieures à cinq mètres par seconde; de fait, sur les vrais planeurs, on peut enregistrer des vitesses d’ascension supérieures à 3-4 mètres/seconde, et, avec nos planeurs, il est parfois réellement difficile d’abandonner un courant ascendant pour éviter de les perdre de vue.
Bon, nous savons a présent en quoi consiste une thermique. L’étape suivante consiste à comprendre comment elles se forment et à quoi elles ressemblent. Les thermiques ne se forment pas n’importe où, ni dans n’importe quelles conditions, et l’une des principales différences entre le débutant et le chasseur de thermiques expérimenté est que le second connaît le mécanisme de leurs formations et l’endroit ou elles se produisent.
Formation des thermiques.
Au bout du compte, c’est la chaleur du soleil qui est responsable du réchauffement de l’air et, donc, de la formation de masses d’air chaud. Cependant, l’air, transparent par définition, ne se réchauffe pas automatiquement au contact du soleil; les thermiques se forment sur des surfaces ou des objets qui, eux, se réchauffent. En règle générale, les surfaces sombres se réchauffent lorsqu’elles sont exposées à la lumière solaire; il n’est donc pas rare qu’il y ait formation de thermiques à ces endroits par exemple, les routes, les parkings ou les surfaces de tout type plus sombres que les surfaces environnantes. Par contre, les masses d’eau se réchauffent moins que leur environnement (ou, plutôt, la chaleur s’y dissipe plus rapidement); c’est pourquoi elles sont plus froides. Aucune ascendance ne se forme sur ces masses d’eau. C’est le moment de retenir deux éléments importants :
1) Tout comme il existe des “ascendances” d’air chaud, il existe aussi des “descendances” de masses d’air relativement froid et dense; si nous faisons évoluer notre modèle dans l’une de ces masses, il perdra assez vite de l’altitude; l’habileté du vélivole consiste à chercher les ascendances et à tirer profit de celles-ci tout en évitant les masses descendantes.
2) Comme nous l’avons indiqué auparavant, les thermiques sont des masses d’air plus chaudes que le reste de l’atmosphère. Il ne doit pas faire excessivement chaud pour qu’elles apparaissent; un peu de soleil suffit à réchauffer le sol plus en certains points que d’autres; de fait, une froide journée d’hiver avec un ciel dégagé peu donner lieu à des thermiques de qualité suffisante pour que nous arrivions à nos fins.
Dimensions des thermiques.
La question suivante est, j’en suis convaincu, intéressante : quelle est la dimension d’une thermique? Je vous donnerai une réponse de Normand : ça dépend. De fait, il existe des thermiques de toutes les dimensions. Au-dessus de notre radiateur de chauffage, nous pouvons avoir une thermique suffisante pour faire tourner les ailes d’un petit moulin à vent. J’ai fait voler un petit planeur d’un peu plus d’un mètre d’envergure sur l’ascendance produite par les braises d’un grand feu. Dans les campagnes, nous pouvons espérer avoir affaire à des ascendances aux dimensions considérables; celles que nous localisons consistent, en général, en des poches d’air de 30-100 mètres de diamètre. Parfois, surtout en été, les ascendances sont telles, qu’on a l’impression que d’immenses étendues se comportent comme une gigantesque ascendance; ces jours là, il est même possible de faire réaliser un vol thermique à un entraîneur à moteur léger.
Manuel du chasseur de thermiques.
Une fois connus les dimensions d’une thermique et les endroits de formation les plus favorables, le moment est venu, planeur et radio en main, de sortir à la recherche d’ascendances. Avant que vous ne soyez amèrement déçus, je dois vous signaler que, bien que les thermiques se forment au ras du sol, il est beaucoup plus facile de trouver une ascendance à une hauteur respectable : plus haut, on est, mieux cela vaut. Les raisons en sont multiples, mais lune d’elles (assez importante) est que si nous pratiquons le lancer-main, nous ne disposerons que de quelques secondes (disons 10-20) pour trouver une ascendance; si, à l’aide de n’importe quel système parmi ceux dont nous parlerons par la suite, nous élevons notre modèle à 200 mètres du sol, nous disposerons de quelques minutes pour localiser une de ces masses d’air. Mais il est néanmoins possible (pas facile) de “saisir” une thermique en lançant notre planeur à la main à partir du sol. Nous traiterons de ces planeurs lancés à la main dans de futurs articles. Il existe de nombreux indices de la formation de thermiques.
D’abord, la présence de cumulus (nuages blancs d’été, ressemblant à de grandes boules de coton) : c’est un signe d’activité thermique. Les vents forts laissent présager des difficultés pour la formation d’ascendances, notamment parce que le vent fragmente les bulles d’air chaud; dans de tels cas, seuls les experts sont capables de trouver des ascendances dont on puisse tirer profit. Lors de journées chaudes et peu venteuses, des changements notoires de température et/ou de direction du vent ou l’apparition de turbulences ou de tourbillons annoncent la formation de thermique ; si l’ascendance est forte, on peut observer que la poussière, les feuilles ou les papiers s’élèvent dans les airs; ces signes sont les indices indiscutables de la naissance d’une ascendance.
Outre ce qui vient d’être dit, le fait d’observer le comportement d’autres “objets” volant pourra aussi nous aider ; les oiseaux profitent des ascendances pour leur vol et nous permettent ainsi de les localiser. Lors de compétitions, il est courant d’attendre que d’autres participants lancent leurs planeurs et nous ” indiquent ” les ascendances.
Pointe d’aile de planeur à haut rendement. | |
Aujourd’hui encore, les modèles thermiques classiques, comme ce “Bird of time”, nous permettent, par temps calme, de passer de bons moments. |
Comment parvenir aux thermiques ?
Comme nous l’avons déjà indiqué, il est possible d’atteindre une thermique en lançant notre planeur à partir du sol . Cependant, il est plus fréquent d’utiliser un système quelconque pour gagner de l’altitude afin d’ ” explorer ” le ciel à la recherche d’ascendances. Les moins “puristes” utilisent un petit moteur a explosion avec un réservoir qui permet une ascension au moteur de quelques minutes; ils coupent, ensuite, ce dernier et poursuivent le vol plané. Le système est simple, efficace et n’alourdit pas trop notre planeur, mais il est peu esthétique ; de plus , les vrais vélivoles sont allergiques aux moteurs et aux carburants, ainsi qu’au bruit qu’ils produisent. Les planeurs à moteur électrique constituent une alternative plus “écologique”, plus silencieuse et aérodynamique. En outre, ils offrent l’avantage de pouvoir allumer et éteindre le moteur depuis l’émetteur. Ils sont toutefois plus complexes, plus chers et plus lourds . Ce système connaît un succès de plus en plus large.
Autre grande technique de lancement : le recours au câble de remorquage. Le système consiste à placer un crochet sous le planeur (à l’avant du centre ]e gravité), où l’on fixe un long câble (50- 150 mètres) terminé par un anneau. Lorsqu’on tire sur le câble, le planeur s’élève comme s’il s’agissait d’un cerf volant. Une fois l’appareil dans les airs, le câble se relâche et le modèle poursuit son vol. Les variantes de ce système sont fonction de la manière dont on tire sur le câble. Le remorquage peut être manuel (un aide court en tirant le planeur) ou mécanique. Dans ce cas, nous avons deux options : la catapulte et te treuil. La catapulte consiste en un élastique d’environ 20-30 mètres de long et 6-10 mm d’épaisseur, uni au câble de remorquage, que l’on tend au maximum pour le lâcher ensuite. C’est un système simple, bon marché et efficace. Mais c’est le treuil qui donne de meilleurs résultats; ce système est d’ailleurs celui utilisé en compétition. Le câble est enroulé sur un tambour mû par un puissant moteur électrique alimenté par une batterie. Les treuils peuvent être très puissants (plus de 3 CV en compétitions) et propulsent le planeur à une altitude bien supérieure à la longueur du câble lui-même. Ce gain de hauteur est l’effet recherché en compétition.
Quelques conseils pratiques
Plusieurs facteurs doivent entrer en ligne de compte pour que le vol thermique soit un succès : tout d’abord, nous devons disposer d’un modèle qui vole bien, correctement construit, équilibré et mis au point. Cela étant, il est absolument nécessaire de faire voler le modèle le plus grand nombre de fois possible, afin de nous familiariser avec son comportement et ses réactions en vol.
Ce n’est qu’alors que nous serons à même de le faire évoluer, en le suivant à peine des yeux; nous pourrons alors nous concentrer sur l’étude du ciel et sur l’observation du terrain et des modèles des autres vélivoles, parfois concurrents. Une fois dans les airs, ce seront les réactions de notre modèle qui nous indiqueront (subtilement ou de façon évidente) s’il y a ou non ascendance; c’est pourquoi nous devons connaître à fond les réactions de notre planeur. Certains modèles nous indiquent la présence de thermiques en se cabrant ou en balançant des ailes; d’autres prennent tout simplement de l’altitude sans que leur stabilité s’en trouve affectée.
La tactique de vol la plus courante consiste à élever le modèle au moyen d’une des techniques que nous venons de décrire. Une fois dans les airs, on règle le planeur à la vitesse de vol souhaitée au moyen des trims de la radio; cette vitesse varie selon le modèle. Ceux que l’on rencontre le plus souvent sur les terrains sont, en général, à vol lent et stable. Une fois le planeur placé dans ces conditions, il s’agit de parcourir la plus grande distance en perdant le moins possible d’altitude, et d’essayer d’identifier les ascendances selon les réactions du modèle. Quand nous croyons être en présence d’une ascendance, nous y faisons évoluer le modèle en cercles. Quels signes nous indiquent-ils que nous sommes dans la bonne voie? Si nous sommes en pleine thermique, notre planeur deviendra de plus en plus petit. Attention ne lui laissez pas prendre trop d’altitude; il ne doit pas échapper à votre contrôle (on a vu des planeurs réapparaître à plus de 60 kilomètres de distance). Dans d’autres cas, ou nous n’aurons pas localisé correctement l’ascendance, nous constaterons que le modèle, qui adopte pourtant une trajectoire rectiligne, vire d’un côté; cela peut signifier que nous sommes entrés en contact avec le bord d’une ascendance, qui essaie d’ “expulser” le planeur. Il faut, alors, virer à 270′ et essayer de voler en cercles à partir du point où la soi-disant ascendance a commencé à nous éloigner. Il est clair qu’il est impossible, en quelques lignes, de présenter un exposé complet sur la façon de tirer profit des ascendances; seule une pratique continue nous permettra de maîtriser parfaitement le vol thermique.
Voyons, pour terminer, comment nous pouvons sortir d’une thermique. Le plus souvent, nous la perdons, tout simplement; mais il arrive que notre planeur atteigne de telles altitudes qu’elles on deviennent critiques. Dans ce cas, il est probable que l’avion se trouve assez haut dans le ciel; n’essayez pas de sortir de l’ascendance un piquant, car il risque de prendre trop de vitesse et de rompre une aile au moment de sortir du piqué (sinistre total assuré). Une bonne solution au problème consiste à utiliser les aérofreins (si nous en disposons); le modèle doit entrer dans une spirale descendante (gouvernail à fond, d’un côté, avec ou sans gouverne de profondeur vers le haut) ainsi, la vitesse de descente reste sous contrôle. Un bon système pour éviter les dommages structurels.